Vreme trece, vreme vine
Passe le temps, vient le temps
Selecţie poeme, note şi versiune franceză
Sélection de poèmes, notes et version française
de/par Paula ROMANESCU
Editor: Gheorghe Păun
Imagine coperta I: Nică Petre, „Eminescu”,
Câmpul Românesc din Hamilton, Canada
Iustraţii, grafică: Adina Romanescu
Ed. Tiparg, Piteşti, 2020
***
Au lieu de préface
MARIN SORESCU – ET PUISQUE TOUT CELA DEVAIT PORTER UN NOM
Eminescu n’a pas existé.
Il était une fois un beau pays au bord d’une mer
Où les vagues faisaient des nœuds blancs
Comme une barbe mal peignée de vieux prince.
Il y avait aussi des eaux comme des arbres coulants
Où la lune faisait son nid rond.
Et surtout il y avait des gens simples –
Mircea Le Vieux, Étienne Le Grand
Ou tout simplement des bergers, des laboureurs,
Qui aimaient dire
Le soir auprès du feu des poésies –
Mioritza, et Hypérion, et Lettre III…
Mais puisqu’ils entendaient toujours
Les chiens aboyer à leur bergerie,
Ils s’en allaient lutter avec les Tatars, avec les Avars,
Avec les Huns, avec les Polonais,
Avec les Turcs…
Le temps qui leur restait libre
Entre deux dangers,
Ces hommes-là faisaient de leurs flûtes des auges
Pour les larmes des pierres attendries
Que les doïnas y coulaient doucement
De toutes les montagnes de Valachie, de Moldavie,
Du Pays de Bârsa, du Pays de Vrancea et
D’autres Pays Roumains.
Il y avait aussi des forêts épaisses
Et un jeune homme qui leur parlait en leur demandant
Pourquoi tremblaient-elles toujours sans nul vent…
Ce jeune homme aux yeux grands
Comme toute notre histoire,
Passait, perdu dans ses rêves,
Du livre cyrillique au livre de la vie,
Tout en comptant les peupliers de la lumière,
De l’amour ou de la raison
Qui restaient toujours impairs.
Il y avait encore des tilleuls et les deux amoureux
Qui savaient en ramasser toutes leurs fleurs par un baiser.
Et il y avait aussi des oiseaux comme des nuages
Qui flottaient au-dessus d’eux
Comme de longs prés mouvementés.
Et puisque tout cela devait porter un nom –
Un seul nom,
On le nomma Eminescu.
***
SONET SATIRIC
Pişcată-ţi este mâna ta de streche,
De mişti în veci condeiul pe hârtie
Durează-un şir sau fabrică o mie:
Cuvinte-nouă-or fi, dar blaga veche.
Ce are-n gând un om, aceea scrie,
Nimica nou tu n-ai de spus, Ureche,
Cu Pantazi fiind pe veci păreche,
Tu izvodeşti, cel mult, ce dânsul ştie.
Ţi-asamăn fruntea unei vii paragini
Şi vânt şi pleavă sunt a tale scrieri,
De zei lipsite, vai! a tale pagini.
Zadarnic paiul sec al minţii-l trieri,
Drapându-i golul ei cu reci imagini:
Nimic nu iese dintr-un dram de crieri.
1876
SONNET SATIRIQUE
Ta main aurait-elle la folie des vaches malades
De toujours faire noircir le papier ?
Tu peux écrire des mots par milliers
Car il y en a beaucoup mais, l’idée fade.
Ce que l’on pense on pourrait l’exprimer
Mais toi, Ureche, tu fais l’accolade
À Pantazi, ton double de parade,
En lui parlant des choses qu’il connaît.
Ton front – vivante ruine d’ancienne cage,
Tes écrits – de l’ivraie et du vent ;
Les dieux, hélas, ne passent pas sur tes pages.
La paille de ta raison, inutilement
Cherches-tu la faire draper de froides images ;
D’un petit grain de cerveau rien ne s’entend.
1876
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ORICARE CAP ÎNGUST
Oricare cap îngust un geniu pară-şi,
Cu versuri, goale de cuprins, să placă
Şi, cum doreşte, zgomot mare facă,
Cununi de lauri de la plebe ceară-şi.
Ci muza mea cu sine se împacă.
Eu am un singur, dar iubit tovarăş,
Şi lui închin a mele şiruri iarăşi,
Cântarea mea, de glorie săracă.
Când dulci-i ochi pe linii or s-alerge,
Va cumpăni în iambi turnata limbă:
Ici va mai pune, dincolo va şterge.
Atuncea ea în lumea mea se plimbă,
Cu-a gândurilor mele navă merge
Şi al ei suflet pe al meu şi-l schimbă.
1878
TOUTE TÊTE ÉTROITE
Toute tête étroite pour un génie se prend
Qui, par des vers qui sonnent faux, veut plaire
Et, à son gré, elle veut du grand bruit faire,
En attendant les lauriers de la gent.
En elle-même ma muse trouve sa lumière,
Je n’ai qu’une seule amie, elle me comprend,
Moi, je lui dédie toujours mes chants
D’amour, de joie, de gloire et de misère.
Quand ses yeux doux sur les lignes passeront,
La langue des ïambes elle va l’apprécier
En mettant ça et là une nuance, un ton
Et dans le monde à moi elle s’y glisserait.
Son cœur avec le mien n’en feront qu’un
En s’embarquant sur l’arche de ma pensée.
1878
***
ORICÂTE STELE
Oricâte stele ard în înălţime,
Oricâte unde-aruncă-n faţă-i marea,
Cu-a lor lumină şi cu scânteiarea
Ce-or fi-nsemnând, ce vor, nu ştie nime.
Deci cum voieşti tu poţi urma cărarea.
Fii bun şi mare, ori pătat de crime,
Acelaşi praf, aceeaşi adâncime,
Iar moştenirea ta şi-a tot: uitarea.
Parcă mă văd murind… în umbra porţii
Aşteaptă cei ce vor să mă îngroape…
Aud cântări şi văd lumini de torţii.
O, umbră dulce, vino mai aproape
Să simt plutind deasupră-mi geniul morţii
Cu aripi negre, umede pleoape.
1878
TOUTES LES ÊTOILES
Toutes les étoiles des cieux que l’on voit briller,
Toutes les vagues frémissantes de la mer
Avec tout leur éclat et toute leur lumière,
Ce qu’elles veulent nous montrer, personne ne le sait.
Donc, toi aussi, tu peux vivre à ton gré :
Que l’on soit bon, mauvais ou solitaire,
La fin sera la même – de la poussière !
Ton héritage – l’art de tout oublier.
Moi, j’imagine ma mort… Cachés dans l’ombre,
Attendent tous ceux qui voudraient m’enterrer…
J’entends des chants, je vois des lumières sombres…
Ô, viens plus près de moi, douce ombre adorée,
Pour que je sente le génie de la mort aux ailes noires,
Flotter au-dessus de moi, de larmes baigné!
1878
***
ALBUMUL
Albumul? Bal mascat cu lume multă,
În care toţi pe sus îşi poartă nasul,
Disimulându-şi mutra, gândul, glasul…
Cu toţi vorbesc şi nimeni nu ascultă.
Şi eu intrai. Mă vezi rărindu-mi pasul.
Un vers încerc cu pana mea incultă.
Pe masa ta aşez o foaie smultă,
Ce de când e nici n-a visat Parnasul.
Spre-a-ţi aminti trecutele petreceri,
Condeiu-n mână tu mi-l pui cu silă.
De la oricine-un snop de paie seceri,
Apoi te uiţi râzând la câte-o filă:
Viclean te bucuri de-ale noastre-ntreceri,
Privind în vrav prostia imobilă.
1878
L’ALBUM
L’album ? Bal masqué où tout le monde
Cache son visage et porte en l’air son nez…
Tous y étalent leur inutilité,
Tous parlent à la fois, personne ne réponde.
J’y suis entré aussi. Toi, tu me reconnais.
Avec ma plume inculte je trace une ligne ronde
De vers sur une banale feuille de papier immonde
Que le Parnasse ne vit de toute l’éternité…
Pour nous rappeler de tous les bals passés,
Tu insistes que j’écrive dans l’album bel et bien –
Du foin que chacun en y doit apporter.
Puis, souriante, tu relis sans chagrin
Les pages – ce florilège de stupidité,
L’indicible bêtise des êtres humains.
1878
***
AI NOȘTRI TINERI
Ai noştri tineri la Paris învaţă
La gât cravatei cum se leagă nodul,
Ş-apoi ni vin de fericesc norodul
Cu chipul lor isteţ de oaie creaţă.
La ei îşi cască ochii săi nerodul,
Că-i vede-n birje răsucind mustaţă,
Ducând în dinţi ţigara lungăreaţă…
Ei toată ziua bat de-a lungul Podul.
Vorbesc pe nas, ca saltimbanci se strâmbă:
Stâlpi de bordel, de crâşme, cafenele
Şi viaţa lor nu şi-o muncesc – şi-o plimbă.
Şi-aceste mărfuri fade, uşurele,
Ce au uitat pân’ şi a noastră limbă,
Pretind a fi pe cerul ţării stele.
1879
NOS JEUNES GENS
Nos jeunes gens à Paris étudient
L’art de faire à la cravate le nœud,
Puis ils nous viennent rendre le peuple heureux
Avec leur tête frisée de sage brebis.
La gent des rues les regarde ahurie
Quand ils passent en voiture, la moustache en queue
D’hirondelle, au coin des lèvres, un cigare en feu,
Car c’est tout ce qu’ils savent faire de leurs jours, de leurs nuits.
Piliers de bordels, de tavernes, ils nasillent,
Roulent les mots en saltimbanques, leur vie
Ils se la coulent douce sans jamais travailler.
Et ces machins légers, ces pâles zombies,
Qui, la langue des ancêtres l’ont déjà oubliée,
Se prennent pour des étoiles dans le ciel du pays.
1879
***
TRECUT-AU ANII
Trecut-au anii ca nori lungi pe şesuri
Şi niciodată n-or să vie iară,
Căci nu mă-ncântă azi cum mă mişcară
Poveşti şi doine, ghicitori, eresuri,
Ce fruntea-mi de copil o-nseninară,
Abia-nţelese, pline de-nţelesuri –
Cu-a tale umbre azi în van mă-mpesuri,
O, ceas al tainei, asfinţit de sară.
Să smulg un sunet din trecutul vieţii,
Să fac, o, suflet, ca din nou să tremuri
Cu mâna mea în van pe liră lunec;
Pierdut e totu-n zarea tinereţii
Şi mută-i gura dulce-a altor vremuri,
Iar timpul creşte-n urma mea… mă-ntunec!
PASSÈRENT LES ANNÉES
Passèrent les années comme de longs nuages
Au-dessus des plaines. Et ne reviendront plus.
Où sont-elles aujourd’hui les histoires que j’ai lues ?
Où les doïnas, les contes et les présages
Qui couronnaient mon front d’enfant perdu
Dans le mystère caché entre les pages
Des livres ? Ô, soleil, en vain la cage
De grandes ombres du soir me l’ouvres-tu !
Pour que j’arrache un cri à ma tristesse
Pour te faire, ô, mon âme, trembler doucement,
En vain passé-je sur ma lyre les doigts de la main !
Perdu le temps heureux de ma jeunesse,
Et toute muette la douce voix d’antan,
Je sombre… derrière moi le temps va grandissant !
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Paula ROMANESCU
București, 15 Iunie 2020